Vidéosurveillance algorithmique : les JO de Paris 2024, entre nécessité sécuritaire et respect des libertés individuelles

Cet article a été rédigé par Simon Richard, Remy Peris, Benjamin Nabet, Tristan Lacoma, Ewen Briand

À l’intersection entre la sécurité publique et les droits individuels, l’implémentation de la vidéosurveillance algorithmique suscite toujours un débat enflammé, même près d’un an après l’adoption de la loi relative aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Alors que certains saluent les avancées technologiques comme des outils essentiels pour assurer la sûreté des événements majeurs, d’autres expriment des préoccupations quant à l’impact sur la vie privée et les libertés civiles. Cette polarisation reflète un dilemme contemporain majeur : comment trouver un équilibre délicat entre la sécurité collective et le respect des droits individuels dans une société de plus en plus connectée et surveillée ?

Sécurité : de nouvelles technologies pour répondre à de nouvelles menaces ?

Le 24 mars 2024, s’est tenu à l’Élysée un Conseil de défense et de sécurité nationale à la suite de l’attentat de Moscou survenu deux jours en amont. De cette réunion au sommet en est ressortie la décision de “rehausser la posture du plan Vigipirate sur l’ensemble du territoire national au niveau « urgence attentat » “ comme cela a été indiqué sur le site du ministère de l’Intérieur, le 25 mars 2024. Cet événement, s’étant pourtant produit de l’autre côté de l’Oural, est venu renforcer l’idée, du moins du côté de la place Beauvau, d’étendre la vidéosurveillance algorithmique au-delà de l’expérimentation alors en cours. “A situation exceptionnelle, moyens exceptionnels”. En effet, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, entend doter de nombreuses caméras de surveillance d’algorithmes permettant, selon lui, de déceler des comportements suspects ou bien de repérer des colis abandonnés et d’ajouter comme justification : “à situation exceptionnelle, moyens exceptionnels”. Si les opposants pointent les risques liés à ce type d’expérimentation, notamment la difficulté à définir ce qu’est un comportement suspect, le gouvernement et les entreprises du milieu se veulent rassurant et assure que ces pratiques seront réalisés sous l’œil avisé de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).

De plus, le député Renaissance résume les nouveaux usages de la technologie instaurés par l’article 7 de la loi relative à Paris 2024 ainsi : “C’est un équilibre satisfaisant entre la préservation des libertés publiques et le renforcement du maintien de l’ordre et de la sécurité des personnes”. Toutefois, les ONG, les associations spécialisées et l’opposition législative ne l’entendent pas de cette oreille.  

La défense des libertés individuelles : un enjeu démocratique

Le texte de loi relatif aux Jeux olympiques de Paris 2024 comprenant le déploiement de la VSA au sein de l’article 7 n’a pas fait l’unanimité, loin de là. Cependant, celui-ci fut adopté par l’Assemblée nationale “à l’ombre du tumulte de la réforme des retraites, et grâce à une procédure comme d’habitude extrêmement rapide”, estime la Quadrature du Net dans un communiqué. En effet, l’association dénonce le timing de l’adoption de la loi, en pleine journée de mobilisation syndicale contre la réforme des retraites, alors que tous justes 73 députés (sur un total de 577) étaient présents dans l’hémicycle.

“La violation de nos droits fondamentaux”

Si la majorité n’y voit rien de plus qu’une “aide à la décision pour nos forces de sécurité”, l’opposition de gauche, incarnée par la NUPES dénote “la violation de nos droits fondamentaux”. En outre, les arguments en défaveur de la VSA sont multiples comme l’indique Noémie Levain, chargée d’analyses juridiques et politiques pour La Quadrature du Net : pour elle, ces technologies affectent essentiellement les personnes les plus vulnérables et précaires, car celles-ci passent plus de temps que d’autres dans la rue, de plus cela ne permettrait pas d’atténuer la délinquance et aiderait tout juste à la résolution d’infraction (moins de 2 % des infractions seraient résolues grâce à la vidéosurveillance).